HAITI : LA ROUE OVALE D’UN PARLEMENT SANS RACINES
La nouvelle législature ne se montre pas plus brillante dans ses intentions que dans ses procédures. La présidence du sénat se prononce publiquement sans l’aval de l’institution, le président de la Commission sur la sécurité lance une lettre ouverte sans le sceau de l’institution. Le manque de préparation, l’absence de modèle, d’élite ou de source d’inspiration professionnelle et une école du parlement font terriblement défaut au point que ce pouvoir indépendant ressemble beaucoup plus, dans son comportement, dans ses déclarations, à une institution de panique en mouvement qu’à une classe de penseurs, de législateurs.
Le pays basculera-t-il encore plus par la faute des parlementaires… – l’appel à la peine de mort comme solution, sous un régime de corruption n’inspire guère confiance pour l’avenir. La reconstitution d’une armée comme force de dissuasion dans un pays où elle a plus que contribué comme force de la peur, de banditisme et de répression, inquiète au plus haut point dans les milieux défenseurs de droits humains. Quand l’ONU, la FAO lancent l’appel pour la recherche de fonds d’urgence en faveur d’Haïti à cause de problèmes liés à la faim, comment comprendre l’attitude de parlementaires qui proposent des zones risquées comme solution! – de quoi inquiéter les donateurs. Il y a, on peut le dire avec certitude, l’usage d’une roue ovale ou excentrique.
Le pays – l’éducation et la formation sont orphelines, le pays a perdu ses éducateurs et formateurs professionnels expérimentés. La santé est d’une morbidité comme système nationale, le principal hôpital universitaire n’offre guère d’exemple ou de ressources aux régions éloignées et aux localités enclavées au milieu de routes inondées ou de chaînes de montagnes en érosion permanente. La société n’offre que son mépris aux enfants de la rue, son indifférence aux familles disloquées, le système social souffre d’anémie humanitaire et de sous financement. Ce sont les autres nations qui soulagent la dette nationale au détriment des acquis de 1804. Le sénateur Lambert évoque la mort comme solution sociale et le sénateur Latortue réclame une ancienne machine de la mort comme outil de travail. Tel est le sombre bilan de l’année et, la liste suit dans cette logique. L’inspiration serait-elle si pauvre !
Faut-il donc crier plus fort? La peine de mort comme solution est une dangereuse folie, même passagère. La solution d’une nouvelle armée ne peut s’étudier à la légère à cause d’un constat d’échec. Pourquoi ?
Bref rappel – L’imbroglio parlementaire qui s’alimente depuis vingt ans démontre à elle seule la malformation forgée par le creuset de la dictature Duvalier au sein d’une institution indépendante de l’exécutif. Ce n’est pas sans rappeler les paroles du candidat Préval en 95′ au Bureau de la Communauté Chrétienne des Haïtiens de Montréal : « la 46ième législature est une législature bonbon, c’est l’exécutif qui devra lui tenir la main.» Les conséquences de la révolution des compères sont connues de tous. La génération subséquente offre encore le même pattern – 10 ans après. Les concernés peuvent-ils donc répondre : jusque à quand cette peine capitale? Quel outillage législatif et judiciaire pour le processus? Où sont les cadres d’exécution pénitentiaire? Quel garde-fou politique comme garantie? Autant de questions qu’on pourrait soulever quand, plus d’une organisation comme Amnistie Internationale pointent déjà du doigt la République de politiciens trop barbares. Le sénateur Lambert y a-t-il pensé? G. Fortuné peut-il apprendre, un peu plus?
Aussi, les malheurs de la Police nationale qui confond le fait de changer d’uniforme au besoin de révoquer son école de corruption, renforcent encore plus la désolation. Les adeptes de pronunciamientos et la méprise de Lavalas comme option démontrent jusqu’à présent l’attachement à ce creuset pathogène plutôt générateur de commerce illégal de drogue nocive. La corruption en est de même au niveau de l’éducation, ce qui accorde peu de manœuvre au système.
L’évocation de la formation d’une armée professionnelle est donc un sujet qui devrait faire l’objet d’un référendum national proposant toutes les garanties étudiées sur période raisonnable, car le court terme ne peut être salutaire. Les parlementaires se sont-ils posés la question? Ce serait donc un problème de génération et d’héritage. L’émotion et la manipulation sont très mauvaises conseillères en ce sens. Aucun parlementaire de cette législature ne détient le mandat de négocier, ne possède les compétences d’étudier en comparatif, à court terme, pour une telle initiative. Ceci n’est pas sans oublier les droits essentiels des Haïtiens vivants à l’extérieur qui sont bafoués pour un quatrième mandat de compères plus une période transitoire et éphémère.
Si ce n’est le mal de se faire de l’argent facile et personnel qui tente des anciens militaires ou affairistes de la place, dans l’achat d’équipements militaires désuets de l’étranger, et, la mise en place d’un autre instrument d’extorsion dans le scénario de la peine de mort, le parlement souffre à plus forte raison, de plus d’une roue ovale qui propose de tourner en chaotique.
Ne serait-il pas le temps d’essayer de tirer meilleur profit de la coopération parlementaire du monde réel de parlementaires associés aux Nations Unies. Essayer d’apprendre à penser. Rejeter l’école des makouts comme modèle, d’apprendre à penser société, nation, patrie. international/23-12-06
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